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SOUVENIRS D’UN PAGE.

faveur. Ces officiers d’un jour faisaient, auprès de la famille royale, le service des officiers des gardes du corps : un jour le banquier de la rue Vivienne remplaçait l’avocat de la rue du Temple, et l’épicier du faubourg Saint-Denis était relevé par le maçon du quartier Saint-Jacques, ou par un brigand de la Bastille qui apportait à la cour sa saleté repoussante et son cynisme grossier. Ces apôtres de l’égalité refusèrent longtemps de recevoir, des mains des pages, la queue des robes des princesses qu’ils devaient prendre, selon l’étiquette, en entrant dans le cabinet ou dans la chapelle. Ce service, dont les premières maisons du royaume se trouvaient honorées, fut dédaigné par des gens qui, six mois auparavant, étaient aux pieds de ceux qu’ils méprisaient ainsi.

La Fayette, surnommé à juste titre, par le feu duc de Choiseul, Gilles 1er, venait tous les jours fortifier ces braves dans leur insolence. Suivi de son état-major, composé en partie de gens tarés dans l’opinion publique, il venait étaler et sa figure blême et ses larges épaulettes. On y voyait moins souvent le maire de Paris, l’académicien Bailly, qui, non content d’une certaine célébrité parmi les astronomes, voulut tout d’un coup devenir homme d’État, et gouverner la capitale de la France. Autant M. Bailly, qu’un journal a surnommé Coco, était savant dans les calculs astronomiques, autant il était inepte dans la politique. Ivre de sa grandeur passagère, il emprisonna, insulta son souverain. Du reste il le suivit de près à l’échafaud, où il supporta,