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SOUVENIRS D’UN PAGE.

beaux chevaux de marbre, travail admirable de Guillaume Coustou, et qu’on a transportés à Paris, à l’entrée des Champs-Élysées. Tous ces bosquets enchantés sont détruit. Ils ont disparu en peu de temps ; mais le souvenir en sera immortel, car ils sont consacrés par ces beaux vers du Virgile français :

Que Louis, la nature… Ce riant Marly,
Que Louis, la nature et l’art ont embelli.
C’est là que tout est grand, que l’art n’est point timide ;
Là tout est enchanté, c’est le palais d’Armide ;
C’est le jardin d’Alcine, ou plutôt d’un héros
Noble dans sa retraite, et grand dans son repos,
Qui cherche encore à vaincre, à dompter les obstacles,
Et ne marche jamais qu’entouré de miracles.
Voyez-vous et les eaux, et la terre, et les bois,
Subjugués à leur tout, obéir à ses lois ?
À ces douze palais, d’élégante structure,
Ces arbres marier leur verte architecture ?
Ces bronzes respirer ? ces fleuves suspendus,
En gros bouillons d’écume à grand bruit descendus,
Tomber, se prolonger dans des canaux superbes,
Là s’épancher en nappe, ici monter en gerbes,
Et dans l’air s’enflammant aux feux d’un soleil pur,
Pleuvoir en gouttes d’or, d’émeraude et d’azur ?
Si j’égare mes pas dans ces bocages sombres,
Des Faunes, des Sylvains en ont peuplé les ombres ;
Et Diane, et Vénus enchantent ces beaux lieux.
Tout bosquet est un temple, et tout marbre est un dieu ;
Et Louis, respirant du fracas des conquêtes,
Semble avoir invité tout l’Olympe à ses fêtes.

Delille, les Jardins, chant I.