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LA CHAPELLE.

de ce moderne Harpagon, par découvrir son nom, à moins qu’une disposition de son testament n’eût perpétué son secret. Ces quêtes, qui, les jours de processions, allaient à plus de cent louis, étaient remises aux curés de Versailles.

Les jours de grande fête qui tombaient un dimanche, on présentait le pain bénit au roi et à la famille royale. C’était un très-gros morceau de brioche. Louis XVI tirait son couteau de sa poche, et, après en avoir coupé une tranche, il donnait le reste aux pages de la chambre. Souvent même il ne prenait point tant de peine : il mordait à même la brioche. Le jour de mon entrée aux pages j’eus le morceau sur lequel les dents du roi avaient laissé leur empreinte, et, dans mon extase provinciale, je ne le mangeai qu’avec un certain respect.

La musique du roi exécutait des messes et des motets composés par les auteurs les plus distingués. À la messe de minuit du jour de Noël, on entendait avec admiration le hautbois du célèbre Bezozzi exécuter de petits airs que le calme de la nuit rendait encore plus gracieux. On avait attaché à la musique du roi douze enfants, appelés pages de la musique, qui remplaçaient les faussets. C’étaient les enfants des valets des officiers de la cour. Ils portaient la livrée de la grande écurie ; mais on les distinguait en ce qu’ils ne pouvaient avoir ni bas de soie ni boucles d’argent.

Quand le roi était dans le bas de la chapelle, on lui présentait le corporal à baiser ; c’était une des préroga-