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SOUVENIRS D’UN PAGE.

de pareilles cruautés ; mais ce qui est incroyable, c’est qu’un ancien et un nouveau qui se retrouvaient ensuite égaux dans le monde étaient, malgré cela, bons amis.

De mon temps, la nouveauté se bornait à l’obéissance la plus exacte et à une distinction de rang qu’entraîne toujours l’ancienneté.

La grande liberté dont on jouissait à la grande écurie, les faibles études que l’on y faisait, l’esprit d’indépendance qui s’y transmettait d’âge en âge, tout cela contribuait à rendre la conduite de ces jeunes gens fort peu régulière. La prison, les arrêts, n’étaient que momentanés ; l’esprit de corps restait ; et il aurait fallu une grande sévérité pour y introduire une réforme. Trois heures de leçon le matin, et deux l’après-dîner, voilà les seuls instants où l’on ne pouvait se répandre dans la ville ; hors de là, on pouvait courir partout jusqu’à neuf heures et demie, heure du souper. On comprend ce qui devait résulter d’une pareille licence, que je trouvais très-douce alors, mais que je ne saurais approuver aujourd’hui.

On disait la messe dans la chapelle, tous les jours ; et deux capucins, du couvent de Meudon, étaient chargés des prédications et de la direction de nos consciences. — Quelles consciences, grand Dieu ! — Mais si l’on n’était pas très-ardent à aller confier aux révérends pères les peccadilles dont on se sentait coupable, on l’était un peu plus à écouter les leçons que nous donnait l’un d’eux, le père Chrysologue, célèbre astro-