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Dans cette armée, les chefs et les soldats sont égaux par le cœur. L’officier compte sur ses hommes, les hommes comptent sur leur officier. Voici un exemple bien véritable (je puis l’attester) des sentiments qui les unissent les uns aux autres :

C’était sur la frontière de l’Est, au début de la campagne, alors que le courage trop nu exposait notre armée à des pertes cruelles. Le commandant D…, très aimé de ses hommes, qui savaient apprécier son intelligence, son énergie et sa douceur, atteint d’une cruelle maladie d’estomac et souffrant d’un anthrax, se faisait porter au feu sur une civière à la tête de son bataillon. Ayant atteint la position qu’il devait occuper, et qui n’était pas des plus sûres, il fit étendre ses hommes sur le ventre et veilla à ce que chacun mît son sac devant soi pour se protéger. Puis il s’étendit lui-même en avant de tout son monde. Et le buste soulevé, sa jumelle devant les yeux, il surveillait les mouvements de l’ennemi, sous une fusillade nourrie.

Il se tenait dans cette position depuis quelques minutes, quand un corps opaque traversa le champ de sa lunette. Mais avant qu’il pût se rendre compte de ce qui passait, il entendit une voix lui murmurer à l’oreille :