terraine, les interminables duels d’artillerie entre deux adversaires invisibles.
Et nos soldats restent dispos, alertes comme au premier jour. Ils occupent par de menus travaux, par des jeux, par des causeries et des chants les ennuis de cette vie enterrée où seuls les obus apportent quelque distraction. Sans crainte, sans tristesse, pieux envers leurs morts, ils couvrent de drapeaux et de rameaux verts la terre sous laquelle leurs compagnons dorment leur dernier sommeil à leurs côtés.
Jeunes soldats, sur lesquels, naguère encore, leur mère veillait comme sur de petits enfants, vieux territoriaux, qui essuient une larme en se rappelant la femme et les nourrissons laissés dans le pays, ils ont, les uns et les autres, la souplesse de l’âge tendre et la fermeté de l’âge mûr.
Les blessés transportés dans nos hôpitaux ne songent qu’à retourner sur le front. Le temps si doux de la convalescence leur pèse. J’ai vu l’un d’eux qui n’eut de cesse qu’on le renvoyât au feu tout boiteux encore. J’ai entendu un jeune sous-officier, mal remis d’une blessure à la poitrine, presser le major de lui donner son congé et dire joliment :
— Maintenant, je puis rejoindre. Qu’ai-je à craindre ? Je suis vacciné.