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LA RELIGION ET L’ANTISÉMITISME


I


Firmin Piédagnel causait depuis deux ans au supérieur du séminaire d’incessantes inquiétudes. Fils unique d’un savetier qui avait son échoppe entre deux contreforts de Saint-Exupère, c’était, par l’éclat de son intelligence, le plus brillant élève de la maison. D’humeur paisible, il était assez bien noté pour la conduite. La timidité de son caractère et la faiblesse de sa complexion semblaient assurer la pureté de ses mœurs. Mais il n’avait ni l’esprit théologique, ni la vocation du sacerdoce. Sa foi même était incertaine.

Grand connaisseur des âmes, M. Lantaigne ne redoutait pas à l’excès, chez les jeunes lévites, ces crises violentes, parfois salutaires, que la grâce apaise. Il s’effrayait, au contraire, des langueurs d’un esprit tranquillement indocile.