Page:France - Opinions sociales, vol 2, 1902.djvu/45

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ferait perdre un admirable instrument de règne. Car les nations armées se laissent conduire avec docilité. La discipline militaire les forme à l’obéissance et l’on ne craint chez elle ni insurrections, ni troubles, ni tumultes d’aucune sorte. Quand le service est obligatoire pour tous, quand tous les citoyens sont soldats ou le furent, toutes les forces sociales se trouvent disposées de manière à protéger le pouvoir, ou même son absence, comme on l’a vu en France.

M. Bergeret en était à ce point de ses considérations politiques lorsque éclata, du côté de la cuisine prochaine, un bruit de graisses répandues sur un brasier ; le maître de conférences en induisit que la jeune Euphémie avait, selon la coutume des jours de gala, renversé sa casserole dans le fourneau après l’y avoir imprudemment dressée sur une pyramide de charbons. Il reconnut qu’un tel fait se produisait avec la rigueur inexorable des lois qui gouvernent le monde. Une exécrable odeur de graillon pénétra dans le cabinet de travail, et M. Bergeret poursuivit en ces mots le cours de ses idées :

— Si l’Europe n’était pas en caserne, on y verrait, comme autrefois, des insurrections éclater, soit en France, soit en Allemagne ou en Italie. Mais les forces obscures qui, par moments, soulèvent les pavés des capitales, trouvent aujourd’hui un emploi régulier dans des corvées de quartier, le pansement des chevaux et le sentiment patriotique.

Le grade de caporal donne une issue con-