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Germains, des Romains, des Sarrasins, et cela fit un peuple, un peuple héroïque et charmant, la France qui naguère encore enseignait la justice, la liberté, la philosophie à l’Europe et au monde. Rappelez-vous la belle parole de Renan ; je voudrais pouvoir la citer exactement : « Ce qui fait que des hommes forment un peuple, c’est le souvenir des grandes choses qu’ils ont faites ensemble et la volonté d’en accomplir de nouvelles. »

— Fort bien, dit M. de Terremondre ; mais, n’ayant pas la volonté d’accomplir de grandes choses avec les juifs, je reste antisémite.

— Êtes-vous bien sûr de pouvoir l’être tout à fait ? demanda M. Bergeret.

— Je ne vous comprends pas, dit M. de Terremondre.

— Je m’expliquerai donc, dit M. Bergeret. Il y a un fait constant : chaque fois qu’on attaque les juifs, on en a un bon nombre pour soi. C’est précisément ce qui arriva à Titus.

À ce point de la conversation, le chien Riquet s’assit sur son derrière au milieu du chemin et regarda son maître avec résignation.

— Vous reconnaîtrez, poursuivit M. Bergeret, que Titus fut assez antisémite entre les années 67 et 70 de notre ère. Il prit Jotapate et en extermina les habitants. Il s’empara de Jérusalem, brûla le temple, fit de la ville un amas de cendres et de décombres qui, n’ayant plus de nom, reçut quelques années plus tard celui d’Ælia Capitolina. Il fit porter à Rome, dans les pompes de son triomphe, le chandelier à sept