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— Un nègre, et vous le cachez ? dit Footit à Tony Greace ; alors, à quoi bon avoir un nègre ? Et il a une très bonne figure !…

Et après avoir serré la main de Raphaël, car c’était lui, — et Raphaël n’était pas médiocrement fier que le grand Footit, qu’il avait tant admiré et applaudi à Madrid, lui trouvât une bonne figure, — Footit se retira tout pensif, car il songeait qu’un nègre eût été pour lui, vraiment, le comparse rêvé, la face noire du nègre à côté de son masque enfariné de clown, — et puis tout ce qu’un nègre évoque immédiatement de gaîté communicative, et d’ahurissement joyeux…

Mais Raphaël était à Tony Greace, et Footit se fût fait scrupule de chercher à priver de ses services un confrère. Raphaël était encore plus au service de Mme Tony Greace qu’à celui de son mari. Paris l’amusait, surtout, depuis qu’il avait découvert les Tuileries, et, aux Tuileries, le Guignol, dont il était devenu un spectateur, — spectateur « à la corde », bien entendu, — mais qui n’en était que plus assidu et enthousiaste.

Tant qu’il avait fini par être déjà populaire parmi le petit public d’habitués, et que c’est pour la joie de ces habitués, — des vieux habitués de cinq ans et demi, — que Guignol s’avisa, un jour, d’interpeller le nègre qu’il apercevait toujours fidèlement posté derrière la corde :

— Eh ! là-bas, le Chocolat !

Et telle est l’origine du nom qui, ayant fait fortune parmi les enfants