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démentit. Des prostituées arrivant de Paris s’étaient mêlées dans les rangs, distribuaient de l’argent aux soldats, et ne négligeaient aucun moyen de séduction. Des députés, armés de sabres et dispersés sur la place d’armes, haranguaient les soldats, provoquaient la révolte et le carnage : « Vive la liberté ! criaient-ils : vive le duc d’Orléans ! Que le duc d’Orléans soit régent du royaume. Nous sommes ici pour vous défendre : vos officiers et les gardes du corps veulent vous assassiner. » À ces provocations, le comte de Montmorin[1], colonel en second du régiment, opposa tout ce que lui suggéra son zèle. En vain, à plusieurs reprises, il rendit compte au château de ce qui se passait ; en vain il exposa que le régiment n’avait pas un coup à tirer, et sollicite un prompt envoi de cartouches : pour réponse, il reçut l’ordre de faire rentrer le régiment. Sur la place d’armes était aussi rangée, comme on l’a dit, la garde nationale de Versailles. Le comte d’Estaing, nommé son commandant, plusieurs fois demandé par sa troupe, et impatiemment attendu, ne parut pas. Mécontente de la conduite de son chef, cette

  1. Fils du marquis de Montmorin-Saint-Hérem, gouverneur de Fontainebleau, et ami personnel de Hüe, massacré en septembre 1792.