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voulant nous donner des avis à cause de notre inexpérience, me prouva combien il paraissait peu chrétien et peu bienveillant à l’égard des femmes.

Je l’avoue, j’ai jugé simplement par mon cœur pour combattre le système de M. Alibert contre la richesse, système qui quoique bien extraordinaire peut avoir de malheureux exemples. Je connais à peine le monde, il le connaît depuis sa jeunesse. Et c’est sans doute pour l’avoir trop connu que M. Alibert a, selon moi, une fausse idée du bonheur. Il parle d’un bijou, d’un schall comme les objets du bonheur. Il oublie la vertu, les principes religieux et, selon moi, voilà le fondement du bonheur auquel je joindrai les premières réflexions de M. Alibert qui m’ont, ainsi qu’à mon frère, semblé justes. À vous, ma bonne mère, la décision, car en tout vous serez ma boussole.

18 juillet. — Ce matin c’était la messe du Roi. Les toilettes y sont brillantes, les dames debout par respect pour le Roi, la musique merveilleuse, selon le monde, mais, suivant ma petite décision, trop mondaine et surtout chantée par des gens trop mondains. Comment se peut-il que nos Princes, si chrétiens, trouvent dans cette messe de quoi satisfaire leur piété ? Il est vrai que, seuls dans leur tribune, ils ne sont distraits que selon leur volonté. Dans l’intérieur de la chapelle, il n’y a, au contraire, aucun recueillement. Il semble que le Roi soit le seul adoré. Tous les regards sont portés sur lui. On tourne le dos à l’autel et la curiosité tient lieu de dévotion. Je voudrais être assez forte pour rester recueillie au milieu de tout le bruit. Peut-être m’y accoutumerai-je ?

J’ai fait aujourd’hui des visites et une surtout qui m’a intéressée. Je voulais connaître une jeune femme dont on m’avait fait l’éloge sans le vouloir.

Madame d’Acher Montgascon[1], dit une dame que je con-

  1. Femme d’un huissier de la chambre du duc d’Angoulême.