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ce magnifique tapis de verdure. Beaux marronniers, superbes marronniers ! que vous avez de charmes pour moi ! Je ne puis profiter de votre ombre bienfaisante. Elle est réservée à nos princes, mais au moins tout ici est tranquille et je puis contempler le ciel, ma pensée s’élèvera plus facilement vers l’auteur de la nature. Je m’y retirerai souvent seule pour réfléchir à Dieu, a mes parents, à mes amis de Seine-et-Marne. »

2 juillet. — Bonheur d’habiter Saint-Cloud. Oui, c’est avec plaisir que je connais Saint-Cloud. Déjà je me promets mille jouissances de cette aimable solitude. Puisse-t-elle être ainsi nommée par moi. Après le déjeuner, j’ai vu le jeune duc de Bordeaux[1] et Mademoiselle descendre chez le roi. Je me suis mise ensuite à l’ouvrage. J’ai été dérangée par le duc de Damas[2] qui, en homme galant et poli, a voulu me présenter de suite à la duchesse. Je n’étais pas en toilette, cependant il a fallu profiter de cette offre. Mon amour propre en eût souffert s’il eût fallu paraître devant une femme hautaine et fière.

Madame de Damas est tout le contraire, l’accueil que j’en ai reçu m’a donné la juste preuve de sa simplicité et surtout de sa bonté. Je suis revenue on ne peut plus contente. J’ai passé le reste de la journée gaiement et utilement. J’ai vu notre roi, madame la dauphine et si, dans la journée, j’ai eu à compter quelque contrariété,


    retenait depuis quelques mois à la Cour, tantôt aux Tuileries, tantôt a Saint-Cloud, quand elle écrivait ce journal à sa mère demeurée en Seine-et-Marne.

  1. Madame Hüe possédait à Saint-Cloud une fort belle chatte jouissant de l’affection particulière du duc de Bordeaux qui venait fréquemment lui offrir ses caresses. On le savait dans l’entourage de madame Hüe et on profitait des heures de récréation du jeune prince pour venir la visiter, afin de le rencontrer.
  2. Le duc de Damas dont il a été plusieurs fois question dans le cours de cet ouvrage était alors premier gentilhomme de la chambre du duc d’Angoulême.