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trouver le nom de son mari et de son beau-frère et qui voit qu’ils ont été oubliés.

C’est du fond de sa tombe, monsieur, que mon mari vous crie de ne pas lui ôter l’honneur. C’est sa veuve, c’est son fils unique qui vous demandent justice. Mais je dois m’expliquer.

Mon mari servait dans les gardes du corps dans les affreuses journées des 5 et 6 octobre. M. de Luchapt, mon mari, M. de Larie, mon beau-frère, M. d’Afflon, officier, et deux autres gardes dont je ne me rappelle pas le nom, étaient au poste de l’appartement de la Reine[1], pressés de toutes parts, ils y entrèrent pour la faire lever et l’engager à se retirer chez le roi. Quelques minutes après, le roi y entra par une autre issue et demanda la Reine. Sachant qu’elle était sauvée, il reprit le même chemin et mon mari lui demanda la permission de le suivre et de mourir à ses côtés, ce qui fut fait.

M. du Repaire, ami intime de mon mari, a été criblé de blessures à l’escalier de marbre et non à la porte de l’appartement. Mon mari, heureux en remplissant son devoir, d’avoir été utile à Sa Majesté ne parloit nullement de sa conduite ; il y étoit encore engagé par M. du Repaire, son ami, qui lui écrivoit continuellement d’attendre pour donner le récit de tout ce qui lui étoit arrivé. Enfin M. du Repaire réclama de l’amitié le détail circonstancié de tous les événemens arrivés à mon mari dans cette nuit désastreuse. Ils lui furent encore demandés par M. le comte d’Agoult. Mon mari fit tout passer à son ami.

Quelque temps après, mon mari reçut de madame Noll, veuve Thibaut, première femme de la Reine, une lettre écrite par ordre de cette Princesse infortunée, pleine de satisfaction de sa conduite, et l’annonce d’une pension de 100 francs sur sa cassette.

  1. Cf., pour ces faits, la Procédure criminelle instruite au Châtelet de Paris, sur les faits d’octobre 1789 (1790).