Page:François Hüe - Souvenirs du Baron Hüe publiés par le baron de Maricourt, 1903.djvu/204

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

base solide de ses vertus. Elle le rendit époux fidèle, père tendre, bon frère, bon maître, en un mot, un modèle de vertus morales et domestiques.

» À mon entrée dans le ministère, désirant vérifier les motifs des lettres de cachet précédemment données, j’avais conçu le projet d’une visite générale des prisons d’État. J’aurais voulu que le Roi fit lui-même la visite de quelques prisons, qu’il en connût le local et le régime intérieur ; je désirais surtout que des prisonniers, trop légèrement ou depuis trop longtemps enfermés, reçussent de la bouche même du monarque l’annonce de leur liberté. Le fond de mon projet plut beaucoup au Roi, il m’ordonna d’en suivre l’exécution et d’y employer les intendants des provinces.

» — Pour moi, ajouta-t-il, je ne visiterai aucune prison. Faisons le bien, monsieur de Malesherbes, mais faisons-le sans ostentation.

» C’est ainsi que le Roi mettait sur ses vertus un voile qu’il étendait jusque sur ses connaissances. C’est un mal ; un Roi doit laisser voir les unes et les autres. Un jour, travaillant avec Sa Majesté, je fus surpris du développement et de l’étendue de ses lumières. Le Roi s’en aperçut.

» — J’ai senti, me dit-il, au sortir de mon éducation, que j’étais loin encore de l’avoir com-