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permission de me voir, je cachai soigneusement sous ses habits l’écrit de M. de Malesherbes, ainsi que plusieurs mots et renseignements précieux que j’avais recueillis. Mon fils, au sortir de la prison, m’informe, par un signal dont nous étions convenus, que ces papiers étaient en sûreté.

— J’ai vu Louis XVI arriver au trône, me disait M. de Malesherbes. Quoique dans l’âge où les passions sont les plus vives et les illusions les plus fortes, il y apportait des mœurs pures, le mépris du faste, une sage disposition au tolérantisme et le désir inépuisable de faire le bien. Son esprit pour la religion était égal à la fermeté de sa croyance. Plus d’une fois, m’exprimant combien il souhaitait que je partageasse ses opinions religieuses il me disait :

» — Sans religion, mon cher Malesherbes, point de vrai bonheur pour les sociétés et pour les individus. La religion est le plus ferme lien des hommes entre eux, elle empêche l’abus de la puissance et de la force, protège le faible, console le malheureux, garantit dans l’ordre social l’observation des devoirs réciproques. Croyez-moi, il est impossible de gouverner les peuples par les principes de la philosophie.

» Cette conviction était chez Louis XVI la