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Après la mort du Roi, jusqu’au 7 avril suivant, je n’éprouvai aucune persécution. Mais ce jour-là, des commissaires de la section dans laquelle j’étais domicilié entrèrent inopinément chez moi et me traduisirent au comité révolutionnaire. Là, j’eus à subir, sur diverses accusations puériles, un long interrogatoire.

La dénégation des faits qu’on alléguait contre moi et l’aveu de mes sentiments tout personnels d’attachement à la personne intime du roi furent ma seule justification, les choses en restèrent là[1]. Un des griefs sur lesquels on insistait le plus

    dante de François Hüe, qui, de ce fait, se trouve actuellement en possession de l’ouvrage dont nous discutons l’origine.

  1. C’est là, peut-être, que Hüe se tira par une présence d’esprit dont il ne se départit jamais, et par une spirituelle saillie, d’une question embarrassante qui lui fut posée par ses juges. Comme on lui reprochait vivement de porter sur lui une tabatière ornée de l’effigie du « tyran :

    « N’en est-il pas de même pour nous tous ? s’écria-t-il. Quel est celui de vous, citoyens, qui n’a point en poche le portrait du ci-devant roi ? »

    Et comme un grand scandale s’élevait en la salle : « Tirez vos bourses, dit-il, et considérez la figure qui décore vos pièces de vingt livres. Ne sont-ce point là des « Louis » ? En vérité, Citoyens, vous ne pouvez me tenir à grief d’agir comme vous le faites vous-mêmes ». François Hüe, par ce badinage, pouvait, il est vrai, perdre la tête ; mais l’aplomb est fréquemment récompensé. Apparemment, il avait pu, avant de parler, juger de la belle humeur de ses juges, car ceux-ci se prirent à rire et passèrent à un autre chef d’accusation. Cette anecdote nous fut maintes fois contée par la baronne André Hüe.