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lettres au Roi et à la Reine et de faire usage de caractères hiéroglyphiques pour faciliter leur correspondance, les caractères n’étaient autre chose qu’un livre d’arithmétique. Tous les soirs, avant que M. le Dauphin se couchât, je posais ce livre sur son lit, afin que le jeune prince pût se préparer le matin à la leçon d’arithmétique que le Roi lui donnait.

Un grief irrémissible était d’avoir chanté dans la tour l’air et les paroles : « Ô Richard ! Ô mon Roi !… » Je n’avais chanté ni l’air, ni les paroles et quand je les aurais chantées, il était trop vrai, que, comme Richard, le Roi était abandonné, que ses sujets les plus dévoués à sa personne et à sa cause s’étaient éloignés pour le servir, que parmi ceux qui étaient restés auprès de lui, les uns avaient été massacrés le 10 août, les autres étaient actuellement en arrestation ou en fuite. Devais-je avoir pour les malheurs de mon maître l’insensibilité que montraient ses persécuteurs ?

Un dernier grief était l’intérêt que la famille royale affectait, selon eux, de me témoigner tandis qu’à peine elle parlait aux commissaires municipaux.

À ce dernier reproche, je restai muet. Les clameurs se renouvelèrent :« À l’Abbaye. À la Force ! »