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lots-concerts, » comme on les appelle dans le quartier Martainville. Le « caboulot-concert » c’est le plus clair de la recette d’un certain nombre de petits marchands de vin.

Le dimanche et le lundi soir, six becs de gaz, dissimulés sous des globes bleu, blanc, rouge, s’allument, et, à la vitrine, le passant aperçoit une pancarte où la fantaisie de l’orthographe dispute la palme à la fantaisie de quelques dessins coloriés, représentant généralement un pioupiou qui ouvre une bouche démesurée et un monsieur très-bien, en habit, qui a la spécialité de chanter les romances sentimentales et de faire battre le cœur des jeunes cuisinières en rupture de fourneaux. Tous ces « bouis-bouis » se ressemblent ; qui en a vu un les a tous vus ; le concert se donne dans une pièce située à l’arrière-boutique et séparée de la salle où s’étale le comptoir par un rideau de perse jaune ou de reps, selon la richesse du débitant et le choix habituel des cliens.

Les sceptiques ou les blasés ne pénètrent pas dans le sanctuaire. Ils consomment sur le comptoir, se contentant de saisir un « morceau d’air, » lorsque le rideau se soulève pour l’entrée ou la sortie d’un client. Les autres, « les noceurs, » ceux qui ne regardent pas à manger tout leur argent avec des