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Notre cicerone nous conduit dans ce qu’il appelle « un refuge de nuit. » On y loge pour la nuit à « la corde » et à la « paille ». La « paille » a plus d’amateurs ! Les murs sont nus, crépis a la chaux ; ils ont jadis été blancs, mais ils ressemblent maintenant à leurs locataires. De tous les côtés on aperçoit dessinées des mains noires ; ce sont les ivrognes qui s’appuyaient aux murs en se couchant, et qui ont « déteint. » Ces traces, à force de se rapprocher, ont presque couvert les parois de la pièce.

« On se croirait dans l’antre des conspirateurs de la Main noire, » dit notre guide, qui s’est occupé autrefois de la politique espagnole.

Côte à côte, noirs, hideux, sous la lumière blafarde d’un quinquet, des tas d’hommes sont entassés sous des bottes de paille ; ça et là, des dessins obscènes tracés au charbon. Les pochards ronflent comme des toupies en faisant des rêves d’or. On paye deux sous pour passer ainsi la nuit. Dans ce fouillis d’êtres humains, on distingue des femmes, quelques-unes ont à la mamelle des enfans.

Quelques autres refuges plus curieux existent dans les petites ruelles du quartier des Arpens. On franchit plusieurs étages, on arrive par une échelle dans un grenier. On cherche la porte. — « Baissez-vous, » dit