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bonne blague ! la bonne blague ! » Et il se tordait dans un éclat de rire prodigieux.

Goffard s’était simplement souillé de vermillon, il s’était peint sur le front le trou qu’aurait fait une balle, et il s’était couché calme, digne, se vengeant ainsi de la mauvaise volonté de son parent.

Le commissaire se mit à pouffer, le parent, déridé, donna cent sous, et Goffard se paya immédiatement, dans un caboulot de la rue Saint-Sever, un « balthazar » succulent.

Une fois, il fut nommé chef d’orchestre d’un théâtre à Lyon. Il n’avait pas d’argent et partit à pied, son violon sous le bras. Au bout de huit jours, exténué de fatigue, couvert de poussière, il arrive à Lyon, et se dirige vers le théâtre ou, ce soir là, les musiciens répétaient sous la direction du sous-chef.

Il entre dans la salle, monte au pupitre, lève son archet et, de sa grosse voix indescriptible :

« Allons ! commençons ! »

Tout le monde rit ; le régisseur accourt. — « Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ? — Je suis Goffard, votre chef d’orchestre : j’arrive de Rouen à pied. »

Quand le directeur vit l’homme, il résilia immédiatement, lui paya son retour avec une indemnité et prit un autre chef d’orchestre.