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en pierres de taille ; on renverse nos ponts suspendus si pittoresques et si élevés, pour les remplacer par des ponts fixes si vulgaires et si bas ; Chicago devient le type de la ville réellement belle, et les cheminées industrielles font concurrence aux monumens gothiques.

Encore, s’il nous restait quelque chose de tout ce grand changement ! Mais, hélas ! la foule suit le mouvement. Où sont, dans notre Normandie, ces costumes variant à l’infini avec les localités et jetant dans le paysage splendide, mais un peu uniforme, sa note changeante ? Aujourd’hui, le paysan du pays de Bray porte le chapeau haut de forme, cet horrible « tuyau de poêle, » et se fait habiller chez Crémieux. Quant aux paysannes, il y a longtemps qu’elles ont jeté le bonnet cauchois par dessus le pressoir à cidre, pour des « capotes à fleurs, » des « cabriolets » parisiens et autres genres de coiffures engendrées par l’imagination, sans cesse en travail, des modistes de la capitale.

Il semblait que quelque chose restait encore debout au milieu de ces changemens à vue. On retrouvait encore dans chaque ville quelques types étranges, quelques métiers bizarres, quelques petites industries curieuses. En remuant la boue des bas-fonds, on pou-