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La lune me surprit là, plongé dans mes rêves,
Seul, et prêtant l’oreille à la chanson des grèves,
Qui m’arrivait mêlée aux cent bruits indistincts
De la forêt voisine et des grands monts lointains ;
Car, après un coup d’œil, devant la nuit croissante,
Mes compagnons avaient tous repris la descente,
Sans jouir plus longtemps du nocturne concert ;
Et j’étais resté seul sur le plateau désert.

Alors de souvenirs quelles vagues pressées
Envahirent soudain mon âme et mes pensées !
Ô sainte majesté des choses d’autrefois,
Vous qui savez si bien, pour répondre à ma voix,
Peupler de visions ma mémoire rebelle,
Que vous fûtes pour moi, ce soir-là, grande et belle !

Je vous revis, là, tous ensemble agenouillés,
Rudes marins bretons, dans vos cabans souillés