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Roseau longtemps en butte au vent de la tempête,
C’est une femme ; l’âge appesantit sa tête,
Et la ride du temps creuse ses traits flétris.
Fille de l’Iroquois à l’âme sanguinaire,
De tout son peuple éteint rejeton centenaire,
C’est le seul et dernier débris.

Dans les drames sanglants que raconte l’histoire,
Elle vit sa tribu périr au champ de gloire ;
Et quand eut succombé le dernier de ses preux,
Elle se retira dans un antre sauvage,
Pour pleurer sa grandeur et mourir au rivage
Du fleuve aimé de ses aïeux.

Elle s’est arrêtée au pied d’un chêne énorme ;
Et, tout en dérobant quelque chose d’informe
Sous les plis déchirés d’un large manteau gris,
Elle parle, et sa voix lugubre et monotone
Semble le grincement et la bise d’automne,
Dans les vieux ormes rabougris :