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Amis, suivant la route où le destin m’entraîne,
Gladiateur vaincu, j’ai déserté l’arène,
La noble arène où vous luttez ;
Avant la fin du jour, j’ai quitté la bataille ;
Troubadour indolent, je n’étais pas de taille
À tenir ferme à vos côtés.

Mais vous qui restez seuls sur la brèche fumante,
N’allez pas, comme moi, céder à la tourmente,
Découragés par les revers.
Leurs soldats sont nombreux : ne comptez pas les vôtres !
Songez que Jésus-Christ n’avait que douze apôtres,
Et qu’ils ont conquis l’Univers !

Oui, voilà ce que peut l’idée ardente et forte.
Elle n’a pas besoin de puissante cohorte,
Encor moins de canons rayés.
Champions de nos droits, guerriers de la pensée,
Oh ! n’allez pas courber votre tête lassée
Devant ces renégats payés !

Le but est noble et grand : la lutte sera rude ;
Mais bientôt, vous là-bas, moi dans ma solitude,
Nous verrons le jour du réveil ;
La voix des opprimés s’élève grandissante…
Demain les nations, ô liberté puissante !
En pliant le genou salueront ton soleil !


Octobre 1866