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L'art d'être une bonne mère

“Les enfants, dit Emile Faguet, veulent savoir, avec une ardeur d’enquête assez, naturelle, comment ils viennent au monde, et on leur répond par des fables qui ne peuvent que redoubler leur curiosité et aggraver et prolonger leur trouble.

Mieux vaudrait, je crois, leur dévoiler entièrement le mystère, non de la génération, mais de la parturition. Leur dire que les femmes enfantent comme les femelles des animaux mettent leurs petits au monde, et comme la fleur fait son fruit, les met en repos sur une idée vraie pour longtemps, satisfait leur curiosité légitime et l’éteint en la satisfaisant, jusqu’au temps de la puberté, où, il sera utile et même nécessaire et obligatoire de leur dévoiler le reste du secret.”

Victor Hugo y va avec plus de discrétion : “ L’âme d’une jeune fille, dit-il, ne doit pas être laissée obscure ; plus tard, il s’y fait des mirages trop brusques et trop vifs comme dans une chambre noire ; elle doit être doucement et discrètement éclairée, plutôt des reflets des réalités que de leur lumière directe et dure ; demi-jour utile et gracieusement austère qui dissipe les peurs puériles et empêche les chutes. Pierre de Coulevain tranche la question par ces lignes : “ Pour les jeunes filles, l’humanité est une chose abstraite. Il en est de même du mariage, elles y entrent de gaieté de cœur, sans savoir à quoi elles s’engagent ! On les laisse dans l’ignorance de la vie qui leur fait commettre un tas de sottises. C’est cruel, barbare et bête !… Avec ce mystère bête autour de la plus grande loi de la nature, nous avons l’air de vouloir donner à Dieu, qui l’a créée, des leçons de pudeur. C’est grotesque ! ”

À l’encontre de ce procédé, s’en trouve un autre diamétralement apposé, celui qu’on a universellement suivi dans notre pays. De crainte de piquer une curiosité chez l’adolescent, et surtout chez la jeune fille, et pour