Page:Fréchette - Contes canadiens, 1919.djvu/87

Cette page a été validée par deux contributeurs.
87
MONTFERRAND

coup de jarret, marqua les clous de sa botte sur le plafond, et avec une grâce parfaite :

— Voici madame, une carte de visite ; vous pourrez la montrer à vos clients : je me nomme Montferrand. La « signature » du colosse a fait une partie de la fortune de la belle hôtelière. On venait la voir de dix lieues à la ronde.

Quand il signe,
Son talon
Égratigne
Le plafond.

* * *

Aux élections de 1832, à Montréal, les troupes firent parler la poudre. C’était du nouveau. Néanmoins il y eut plus d’un engagement au bout du bras. Le grand Voyer tua un tory d’un coup de poing, sur la place du marché au foin (carré Victoria à présent). Une poussée formidable s’organisa contre lui. Montferrand se tenait près de Voyer, qu’il appelait familièrement son papa. À l’approche de cette vague humaine, il lança un coup de poing qui renversa trois hommes. La bande, toute décontenancée recula. On la poursuivit et elle ne reparut plus de la journée.

L’adresse avec laquelle Montferrand choisissait, dans une foule, l’individu ou le groupe qu’il s’agissait de frapper pour jeter l’épouvante parmi le reste, a été observée dans tous ses grands combats. Jamais il ne perdait son temps. Pas un geste inutile. C’est de lui qu’on peut dire : « tous les coups portaient. »