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MONTFERRAND

pas sur le sol. On l’a vu plus d’une fois s’enlever et marquer du talon de sa botte le plafond des salles « basses comme
Marquer du talon de sa botte le plafond.
celles de toutes les demeures de cette époque » où il s’amusait avec ses camarades. Bondir à pieds joints par-dessus une table ou une barrière était pour lui un jeu quotidien.

Son caractère était très doux. Ayant conscience de sa force surhumaine et du milieu dans lequel il vivait, il était toujours en garde et réglait son humeur d’après la justice et le droit. Loyal et honnête, il s’était acquis la réputation d’un gentleman. La famille Montferrand, très rangée, économe et bien notée dans le faubourg Saint-Laurent, élevait ses fils avec tout le soin désirable. Notre héros se ressentit toujours de la sollicitude de ses parents envers lui.

* * *

La rue des Allemands, lieu de naissance de Montferrand, est en plein milieu du quartier Saint-Laurent où se réunissaient avant 1840 tous les hommes forts de passage à Montréal. Les tavernes y abondaient. Le mélange des nationalités s’ajoutait à la physionomie déjà étrange de ce quartier. Tout voyageur un peu solide tenait à s’y faire connaître, mais on ne se battait bien que sur la grève, au pied de la place Jacques-Cartier. Être connu au faubourg Saint-Laurent,