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UN MURILLO
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portait sous son bras, et qui n’était autre que la copie du Murillo peinte avec tant de soins par Maurice, et qui avait figuré le soir même à la crèche de Noël, dans l’église de la paroisse.

— Mon Enfant-Jésus ! s’écria Suzanne hors d’elle-même. C’est bien lui ; je n’avais pas rêvé… Et tout neuf !… tout rajeuni !… tout rayonnant !… Comment se fait-il… ?

— Mademoiselle, dit le bon curé, on vient de m’apprendre qu’il y a pour vous un grand souvenir et une touchante histoire de dévouement attachés à cette charmante peinture ; vous méritez qu’elle vous revienne, et j’ai tenu à honneur de vous la présenter moi-même dès ce soir. La paroisse vous doit bien cela pour les services précieux et gratuits que vous rendez à notre église, d’un bout à l’autre de l’année, comme organiste et cantatrice.

— Noël ! Noël ! recommencèrent toutes les voix, pendant que Suzanne, les mains jointes, et encore sous le coup de la surprise disait :

— Monsieur le curé, parlez ! ce n’est pas un rêve que je fais ; c’est un miracle, n’est-ce pas ?

— Oui, mon enfant, un miracle de savoir-faire. Demandez à mon nouveau paroissien, M. Maurice Flavigny, qui va se charger, n’est-ce pas, de dissimuler la soustraction que je viens de commettre au détriment de ma fabrique et à l’insu de mes marguilliers.

La jeune fille se tourna lentement, et rendit au jeune homme le long regard dont il l’avait caressée un instant auparavant.

Après s’être devinés, ils se comprenaient.