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UN MURILLO

Et le jeune médecin, après avoir fait sauter les bouchons et rempli les verres, leva le sien en s’écriant :

— Mes amis, à la santé, d’abord, de Mme Flavigny ; et puis, à celle de mon brave camarade, Maurice, nouveau Messie, qui nous arrive, comme un Enfant-Jésus, en pleine nuit de Noël !

— Noël ! Noël ! crièrent tous les convives en se levant, et en choquant leurs verres, d’un côté de la table à l’autre.

Suzanne avait disparu.

Celui à qui l’on venait de porter un toast si cordial se leva à son tour, pendant que tous les autres reprenaient leurs sièges, et, après avoir vidé son verre :

— Mes amis, commença-t-il d’une voix émue…

Il s’interrompit.

Une voix délicieuse, la même qui avait tant surpris le jeune peintre à son entrée dans l’église, une de ces voix qui partent du cœur et qui vont au cœur, une voix dont le timbre laissait comme transparaître on ne sait quelle fraîcheur d’émotion sereine, venait de se faire entendre dans une pièce voisine, soutenue par un petit mélodium dont les sons tremblants et doux se mariaient avec elle d’une façon charmante.

La voix chantait :

Nouvelle agréable !

Aux dernières notes du joyeux couplet, les applaudissements éclatèrent de tous côtés :

— Noël ! Noël ! cria-t-on de nouveau.

Maurice embrassait sa mère qui pleurait.