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l’écurie. Les douaniers se rendirent à la grange pour cueillir le contrebandier à la descente de sa voiture. Le cheval avait le nez dans la porte et Lachance ne descendait toujours pas, malgré les appels réitérés et rien moins qu’invitants des policiers. Il ne pouvait ni répondre, ni descendre, le malheureux ; il était mort.

Toute cette affaire fit du bruit dans la paroisse, et même dans tout le comté où Lachance était bien connu. Sa femme, un peu timide comme vous la connaissez, alla exposer à son curé son intention de quitter la paroisse, tant pour fuir la honte pour elle-même que pour sauver ses enfants des mêmes périls. L’aîné avait alors 16 ans.

Brouillette s’adressa à moi pour demander asile à cette infortune ; vous voyez qu’il avait à cœur la tranquillité de sa paroissienne, car l’Islet, ce n’est pas à la porte, n’est-ce pas ?

Précisément dans ce temps-là, Narcisse Godin, pauvre tête folle, venait de partir pour les États, laissant en vente ses trois quarts d’arpent de terre avec sa maison. Le notaire Larue en écrivit à madame Lachance qui arriva bientôt, armes et bagages, et en fit l’acquisition.

Ni Louis que l’exemple de son père avait effrayé ; ni Firmin qui a le caractère de sa mère, ne parurent vouloir suivre les traces de leur père. Ce sont, comme vous le savez, les meilleurs de nos paroissiens. Cyprien au contraire, malgré les supplications et les larmes de sa pieuse mère, les conseils et l’exemple de ses frères, ne voulut jamais entendre parler de prendre une terre. Quand il se maria avec Céline Larri-