Page:Frère Gilles - L'héritage maudit, 1919.djvu/54

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 54 —

sur le seuil, un homme qu’elle ne connaissait pas, et qui marchait à reculons, tirant un fardeau qu’un autre homme dont elle apercevait la casquette, l’aidait à soulever, plus bas, dans l’escalier.

Ahurie, ne comprenant rien, elle se jeta de côté, pour laisser le passage libre. Mais elle n’eut pas plutôt jeté les yeux sur le fardeau que les hommes venaient de déposer sur le canapé, près de la porte, qu’elle poussa un cri d’horreur, et elle aurait laissé choir la lampe, si l’un des hommes ne la lui eut enlevée des mains pour la mettre sur la table. Elle avait reconnu Cyprien, tout sanglant, la respiration haletante, oppressée, toute chargée des vapeurs de l’alcool.

Son premier mouvement fut de s’élancer vers son mari, mais l’un des hommes l’arrêta et lui demanda une serviette et de l’eau chaude pour laver et bander la plaie. Quant à son compagnon, il était déjà parti à la recherche d’un chirurgien.

Voici ce qui était arrivé. Selon son habitude, Cyprien avait passé la soirée à l’hôtel “Quick-jump” à jouer aux cartes et à boire. Il était environ minuit lorsque la chicane se déclara entre les joueurs et Cyprien, trop chanceux ce soir-là. L’heure étant sonnée de clore son respectable établissement, le cher Justin prit tendrement son bien-aimé beau-frère par… les épaules et le poussa dehors avec ses amis. Dégrisés et rafraîchis par l’air pur du soir, les buveurs semblèrent oublier leur querelle et se séparèrent, les uns allant à droite et les autres à gauche. Pendant que Cyprien prenait en zigzaguant le che-