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temps. Il allait partir en prescrivant une potion calmante, lorsque Cyprien, à demi vêtu, la figure toute bouffie, les yeux sanguinolents et encore hébétés de son ivresse de la veille, parut dans la porte.

— C’est vous le père de cet enfant ? demanda le médecin en rajustant son binocle rétif.

— Oui, docteur.

— Je n’ai pas besoin de vous demander si vous buvez, ça se voit.

— ! ! !

— Vous pouvez contempler votre ouvrage. Votre brutalité d’hier soir n’a fait qu’accélérer la marche de la maladie de votre enfant. Vous lui aviez donné la vie… vous la tuez deux fois…

— Vous badinez, Docteur.

— Un médecin ne badine jamais dans l’exercice de sa profession.

— Si vous me disiez que… l’accident d’hier soir est la cause de la mort, je pourrais peut-être vous croire, mais autrement, ce n’est pas possible. Voyez comme je suis solide ; je n’ai jamais été malade de ma vie.

— Cela n’empêche pas tout de même que la mort vous guette pour vous étouffer un jour ou l’autre. En attendant, ce sont vos enfants qui paient. Jetez un coup d’œil sur cet autre petit martyr dans son berceau ; le bourreau, je vous le répète, c’est vous, c’est vous.

— Je ne comprends pas.

— Accompagnez-moi chez le pharmacien d’où vous rapporterez la potion calmante que j’ai prescrite pour votre enfant ; je vous expliquerai la chose en route.