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ries des femmes, tu resteras toute ta vie l’habitant que tu es. Tu ne mérites pas d’en sortir. Dans le ménage, c’est l’homme qui est maître ; la femme doit obéir sinon… et il termina par des gestes non équivoques qui donnaient à penser que les épaules de sa tendre moitié n’étaient pas aussi roses que le velours de son chapeau dernier cri.

Cette conversation avait lieu au mois de décembre. Pendant l’hiver, les choses allèrent de mal en pis sur la ferme. Chacun des voyages de Cyprien à Montréal donnait le signal d’une attaque, de la part de Justin, qui put enfin se réjouir au printemps d’avoir gagné la bataille.

Un soir du mois de mars que Cyprien arrivait de Montréal, ayant bu tout juste pour se donner de l’audace, il annonça à brûle-pourpoint à sa femme qu’il fallait préparer les bagages pour s’en aller en ville.

— Jour du pays ! Quoi faire ? demanda tante Mérance toute saisie.

— Y rester, répondit Cyprien d’un ton rogue.

— Toujours ?

— Toujours !

— Eh bien, allez-y.

— Je ne vous invite pas non plus.

Les larmes aux yeux, la bonne vieille se tourna vers Céline en disant : Ma pauvre petite fille !

— Cette petite fille, reprit Cyprien d’un ton mauvais, c’est ma femme et elle me suivra…

Céline voulut l’interrompre :

— Cyprien, dit-elle doucement.

— Il n’y a pas de Cyprien ni de cajôleries,