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prien se hâta-t-il de remercier France, alléguant les raisons bien plausibles d’ailleurs, qu’il était jeune, plein de forces, et qu’il n’avait pas les moyens de payer un homme à l’année.

France fit promptement ses préparatifs de départ. Et dire que lui aussi, il avait pensé prendre le bien à ferme ! Mais un garçon ne prend pas une terre à cultiver sans avoir, dans un avenir assez rapproché, l’espoir d’y conduire une épouse. Et nous savons que tel n’était pas le cas de France. Il partit donc, et malgré que Céline ignorât ses sentiments à son égard, ses adieux peu prolixes devaient rester comme un petit point lumineux dans la mémoire de la jeune fille.

Cyprien s’était mis au travail avec bonne humeur et entrain. Pour poser nettement à la face de la paroisse sa candidature à la main de Céline, qui le trouvait « fin comme toute », chaque dimanche il allait la reconduire chez elle après la grand’messe. Le soir, il ne manquait pas de venir passer trois heures entre Céline et tante Mérance, plus près de celle-là que de celle-ci, naturellement. Averti par sa mère avant son départ sans doute, on ne l’avait pas revu à la « bebotte » de Jean Bois. Il s’était même repris à suivre les réunions hebdomadaires que le vicaire tenait pour les jeunes gens de la paroisse ; et il avait la précaution d’en rapporter les sujets de conférences et de les commenter au cours de ses soirées avec Céline. Si l’exposition de ces théories paraissait hors de propos à Céline, c’était autant de coups habiles, et dirigés avec un art machiavélique, qui venaient battre en brèche les