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III

Il sera facile de comprendre l’embarras du père Braise, lorsque le lendemain de la corvée qui avait donné lieu à la fête de la Sainte-Catherine à laquelle nous avons assistés, il vit la veuve Lachance se présenter chez lui et lui demander pour Cyprien la main de Céline.

Si la veuve Lachance s’attendait à voir sa demande accueillie avec enthousiasme, elle dut être amèrement déçue. Devant la gêne évidente de son interlocuteur, elle crut devoir faire remarquer qu’elle demandait moins une promesse formelle de mariage que l’espérance de pouvoir y compter un jour.

Le père Braise prit alors son courage à deux mains, comme on dit chez nous, et confessa avec franchise que Cyprien n’était pas du tout l’idéal du mari qu’il avait rêvé pour sa fille.

— Et pourquoi donc, si je ne suis pas indiscrète ? dit la veuve Lachance intriguée.

— C’est un peu difficile à dire, madame Lachance.

— Ce n’est toujours pas un crime ?

— Eh ! oui, vous l’avez dit.

— Un crime ! vous voulez rire évidemment.

— Rien de plus sérieux, madame Lachance.

— Enfin, expliquez-vous, de grâce.

— Puisque vous le voulez ! On le voit trop souvent à la « bebotte » votre Cyprien. Il ne crache pas dans son verre, comme on dit, et ce n’est pas un certificat pour le bonheur de sa femme, je vous en réponds.