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MAGU


Un des premiers venus et des plus sincères parmi les ouvriers poètes de ce temps-ci. Pauvre tisserand à Lizy-sur-Ourcq, dans la Brie, il devint poète tout naturellement, sans autre étude que quelques lectures, et ne s’abusant pas sur ce qu’il pourrait faire. Il nous le dit en toute franchise dans sa pièce : Pourquoi je ne suis poète qu’à demi. En 1839, à cinquante et un ans, ayant déjà beaucoup rimé, il se laissa aller à publier un recueil au titre le plus modeste, Poésies. Le succès lui fit bientôt donner un second volume. Comme l’abeille qu’il a si bien chantée dans une de ses pièces les mieux inspirées, il butinait dans tous ses épis. En 1845, il n’en fit qu’une seule gerbe, un recueil unique, dont un ami, M. Aug. Chopin, avait avant de mourir payé les frais, et que madame Sand recommanda par une préface des plus sympathiques pour « le bonhomme Magu », comme elle l’appelle, et pour ses vers : « Il y en a, dit-elle, de si vraiment adorables qu’on est attendri, et qu’on n’a le courage de rien critiquer. »

Magu est mort en 1860, à soixante-douze ans.


À MA NAVETTE


Cours devant moi, ma petite navette ;
Passe, passe rapidement !
C’est toi qui nourris le poète,
Aussi t’aime-t-il tendrement.

Confiant dans maintes promesses,
Eh quoi ! j’ai pu te négliger…
Va, je te rendrai mes caresses,
Tu ne me verras plus changer.