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GUÉRIN (Georges-Maurice de)



C’est seulement après sa mort, à vingt-huit ans, en 1839, dans un château du Languedoc, où s’était passée sa vie solitaire et presque sauvage, que Maurice de Guérin fut connu. Il laissait un Journal de ses impressions, des fragments de poésies, et un poème en prose, le Centaure, dont un ami, qui put en lire le manuscrit, fut frappé. Il le porta à madame Sand, dont l’admiration fut pareille.

Sans perdre de temps, elle publia, dans la Revue des Deux Mondes du 15 mai 1840, un article sur M. de Guérin, en lui donnant par erreur un de ses prénoms pour l’autre. Elle l’appela Georges, tandis que dans sa famille on l’appelait Maurice. De longs fragments accompagnaient et justifiaient l’article.

Ce fut pendant longtemps encore tout ce que l’on eut de Maurice de Guérin. Enfin, sa sœur Eugénie, qui l’avait aidé à mourir, comme elle l’avait soigné dans la vie, étant morte à son tour, laissant elle aussi un Journal et des Lettres dignes d’être connus, on les recueillit en même temps que les quelques œuvres de son frère, joignant ainsi les reliques de leurs pensées dans les mêmes volumes, comme on avait réuni leurs restes dans la même tombe.


L’ATTRAIT DE LA MER


Non, ce n’est plus assez de la roche lointaine
Où mes jours, consumés à contempler les mers,
Ont nourri dans mon sein un amour qui m’entraîne
À suivre aveuglément l’attrait des flots amers.
Il me faut sur le bord une grotte profonde
Que l’orage remplit d’écume et de clameurs,
Où, quand le dieu du jour se lève sur le monde.
L’œil règne et se contente au vaste sein de l’onde,