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À vrai dire, cette citation ne manquait point d’à-propos. Dieux, quelle belle journée ! — Figurez-vous une de ces divines après-midis du commencement de l’été, où la lumière est si puissante qu’elle enivre presque, et qui vous donnent envie malgré vous de tout planter là pour aller courir les bois et les grèves… Des fleurs dans tous les jardins, des oiseaux dans tous les arbres, et partout la riante verdure éclaboussée de soleil.

— Juin, juillet et août… fis-je pensivement. Je n’irai pas cueillir la fraise au bois cette année.

— Non, me dit cet aimable homme, mais il doit y en avoir dans la cour de la prison : il me semble en avoir vu.

J’étais distrait.

— Quoi donc ? demandai-je.

— Des fraises.

— Ah !…

La conversation commençait à languir, lorsqu’enfin nous débouchâmes dans l’avenue de la Grande-Allée.

Encore quelques minutes de marche — le temps de griller une dernière cigarette, — et la prison nous apparaissait dans toute sa splendeur, à trois arpents devant nous.