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LA LANGUE FRANÇAISE AU CANADA

conséquence indirecte. Outre l’action que par lui-même il produit sur les hommes, le climat en effet a cet inconvénient encore, en notre beau pays, de leur imposer comme on sait des conditions de vie aussi défavorables que possible au développement d’une véritable civilisation. Une de ces conditions est l’isolement auquel sont condamnés, six mois sur douze, les habitants de nos campagnes — et qui de nous ne vient de la campagne ? Une autre est cette oisiveté à laquelle de même la longueur et la rigueur de l’hiver donnent occasion, et que dénonçait, précisément en ces termes, le bon intendant Hocquart dès l’an de grâce 1757. Isolement, oisiveté : faut-il s’étonner que ces deux causes aient eu sur nous les effets qu’elles ont toujours eus sur tous les hommes dans tous les pays, et n’est-il pas au contraire naturel que, condamnés par la force des choses à vivre sous leur influence, nous soyons devenus les êtres amortis, nonchalants et relâchés que nous sommes ?… — c) Joignez-y, s’il vous plaît, un fait bien à tort négligé, selon moi, par toutes les solutions qu’on jusqu’ici proposées de l’énigme canadienne, — c’est à savoir l’absence à peu près complète de tout service militaire en notre pays, pendant un siècle et demi. Circonstance d’une portée incalculable, en effet, et dont on ne saurait s’exagérer l’importance, si rien, comme je le crois,