C’est un bel encrier tout flambant neuf, rempli jusqu’au bord de bonne encre fraîche et claire. Oh ! le merveilleux liquide ! Comme il fera d’agréables éclaboussures sur de certains visages !
Et s’il coule facilement ! Il glisse sous la plume comme une gorgée de XXO dans le gosier du voisin.
Je gagerais que voilà de l’encre qui n’a pas gelé : on s’aperçoit bien que nous avons changé de bureaux. Mais on chauffe donc, ici ? Nous n’habitons donc plus les froides régions de l’opposition, comme disent M. Larue, mon barbier, et M. Rodolphe Lemieux ?… C’est du luxe, et je proteste. — Monsieur l’Administrateur, vous êtes d’une extravagance, d’une prodigalité scandaleuse, et je vous dénoncerai à votre Bureau de Direction !
… L’encrier, sans être de bronze ou d’argent, a bien dû coûter trente sous. C’est du luxe aussi, mais du luxe de bon aloi.
Mes yeux, charmés, vont de cet objet à la grosse bouteille d’encre qu’on vient de m’appor-
- ↑ Paru dans le premier numéro du Devoir, le 10 janvier 1910, et inaugurant une série de billets du soir.