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LA STATUE DE MERCIER[1]

On pourra dire et penser de Mercier bien du mal : on pourra lui reprocher des erreurs, des égarements, des excès. Ce que nul ne contestera sérieusement, c’est qu’il a aimé son pays avec passion ; qu’il a eu le culte éperdu de sa race, et qu’il n’a cessé jusques en ses pires défaillances de rêver pour elle un avenir de progrès et de grandeur.

C’est assez pour qu’à nos yeux on ait eu raison de lui dresser une statue. Cet homme au cœur si faible, ce patriote parfois un peu fou, n’aura pas fait pour nous moins que les plus illustres de ses devanciers. Il ne lui a été donné, ni de réaliser ses vastes conceptions, ni même d’éviter certaines chutes dont sa haute nature aurait pourtant dû le préserver. De toute son œuvre administrative, c’est à peine aujourd’hui s’il reste quelque vestige. Mais son influence morale, qui n’est pas près de finir, aura été incalculable. À une époque perdue d’indifférence, d’égoïsme et de veulerie, il a eu l’honneur de ranimer chez nous, avec l’amour de la terre natale, le sentiment de la solidarité nationale. Il a su communiquer à ses compatrio-

  1. Nationaliste, 5 décembre 1909.