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MON ENCRIER

La supériorité écrasante de sa flotte dépasse tout ce qu’en disaient les plus optimistes…

Les prises de guerre opérées en quatre semaines par les marins anglais sur le commerce allemand représenteront le joli denier de trois cent cinquante millions de dollars.

En fait et en droit, le Canada, colonie britannique, n’avait donc aucune raison directe d’intervenir dans le conflit. Il en avait de très graves de s’abstenir ; et l’avenir se chargera de démontrer, trop durement peut-être, que son intervention militaire, peu efficace pour les nations en guerre, aura des conséquences désastreuses pour lui.

Comme vous le voyez, c’est clair, c’est net, et nous n’avons pas à le lui faire dire : — Le Canada se devait de ne participer à la guerre européenne que dans la stricte mesure de ses obligations et de ses intérêts. Or, d’une part, le Canada n’avait « aucune obligation morale ou constitutionnelle », ni, d’autre part, « aucun intérêt immédiat » dans ce conflit ; il n’avait « aucune raison directe d’y intervenir » ; il en avait au contraire « de très graves de s’abstenir », ce qui lui eût évité les « conséquences désastreuses » qu’aura pour lui cette aventure…

Ainsi pensait et parlait M. Bourassa le 8 septembre 1914, dans le même temps (le dirait-on ?) qu’il se prétendait favorable à l’intervention ! Je demande en quoi ce langage diffère, si peu que ce soit, de celui qu’il tient depuis qu’il s’est ouvertement déclaré contre toute forme et toute mesure d’intervention.

Je demande surtout comment, par quel étonnant prodige, sous l’empire de quel envoûtement, ayant une fois posé les prémisses que je