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Scène II



 
Hespérie, Mélisse


HESPÉRIE
.


Ma Soeur, dites le vrai, que vous disait Phalante ?

MÉLISSE
.


Il me parlait d'amour.

HESPÉRIE
.


Ô la ruse excellente !

Donc il s'adresse à vous, n'osant pas m'aborder ;

Pour vous donner le soin de me persuader ? [420]

MÉLISSE
.


Ne flattez point, ma soeur, votre esprit de la sorte,

Phalante me parlait de l'amour qu'il me porte :

Que si je veux fléchir mon coeur trop rigoureux,

Ses biens me pourront mettre en un état heureux.

Mais quoi ? Jugez, ma soeur, quel conseil je dois prendre ; [425]

Et si je puis l'aimer, aimant un Alexandre.

HESPÉRIE
.


Vous pensez m'abuser d'un entretien moqueur,

Pour prendre mieux le temps de le mettre en mon coeur.

Mais, ma soeur, croyez-moi, n'en prenez point la peine.

En vain vous me direz que je suis inhumaine : [430]

Que je dois par pitié soulager ses amours :

Cent fois le jour j'entends de semblables discours,

Je suis de mille amants sans cesse importunée,

Et crois qu'à ce tourment le ciel m'a destinée.

L'on me vient rapporter, Lysis s'en va mourir : [435]

D'un regard pour le moins venez le secourir :

Eurylas s'est plongé dans la mélancolie.

L'amour de Licidas s'est tournée en folie.

Périandre a dessein de vous faire enlever.

Une flotte d'amants vient de vous arriver. [440]

Si Cotylas n'en meurt il sera bien malade.

Un Roi pour vous avoir envoie une ambassade.

Thirsis vous idolâtre et vous dresse un autel

C'est pour vous ce matin que c'est fait un duel.

Aussi de mon portrait chacun veut la copie. [445]

C'est pour moi qu'est venu le Roi d'Éthiopie.

Hier j'en blessai trois d'un regard innocent.