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nous présente des considérations sociologiques sur l’industrie moderne, M. de Krauz, sur la psychiâtrie et la dégénérescence ; M. Dorado rapproche la sociologie du droit pénal ; M. Posada étudie l’anarchisme au point de vue sociologique ; M. Combes de Lestrade s’occupe de la division du sol et de ses effets sociaux ; M. Mandello, de l’importance sociologique des agglomérations ; M. Abrikossof, de l’adaptation des individus au milieu social.

Ne pouvant tout passer en revue, nous nous arrêterons à l’essai très important de M. Gabriel Tarde sur la « sociologie élémentaire » qui fait le plus grand honneur aux études françaises de sociologie. Cet essai est tout ensemble une exposition des idées fondamentales de M. Tarde et une critique des idées d’un autre sociologue, lui aussi éminent, M. Durkheim, qui a récemment publié un travail très remarquable sur la méthode sociologique. Ces deux écrivains représentent deux tendances dominantes et contraires de la sociologie actuelle ; l’une toute positiviste et objective, qui aboutit à considérer les faits sociaux comme des « choses » indépendantes des volontés humaines et ayant une sorte d’existence à part des individus ; l’autre, qui rattache — la sociologie à la psychologie et la considère comme une sorte de psychologie collective. M. Tarde est de ceux qui prennent cette seconde direction.

La conception juridique du lien social est celle qui le ramène à un contrat, explicite ou implicite. À quoi M. Tarde répond qu’on est associé de fait sans avoir jamais contracté, même implicitement. — Mais on pourrait répliquer que le seul fait de vivre et d’agir au sein d’une société quelconque, alors même qu’on est contraint d’y vivre et d’y agir, entraîne, comme conséquence de ce consentement général, d’abord forcé, une série de consentements partiels ; que, en définitive, de bon cœur ou de mauvais gré, on finit par accepter pour son compte la convention sociale, et par essayer d’en tourner les avantages à son profit personnel. Il y a un désir fondamental de vivre en société, qu’il est impossible de mettre ici hors de compte. Donc, sans consentir à une foule de choses qui se passent dans toute société où on a été jeté de fait, on consent à une foule d’autres, et on se résigne à supporter le reste, ce qui est encore une manière d’acceptation « la mort dans l’âme ». Bref, il y a toujours un élément volontaire dans la participation d’un être intelligent à la vie sociale sous une de ses formes et dans un de ses lieux d’action. Et cet élément rationnel est beaucoup plus vraiment social que l’élément imitatif, qui est machinal et si voisin du mécanisme.

De même, la conception économique du lien social le ramène à un