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DESCARTES.

lent avec inquiétude devant cette nécessité pour la matière, essentiellement mobile, de prendre successivement toutes les formes dont elle est capable, et d’arriver, quel que soit le point de départ, à l’état présent du monde, où vous vivez et où je vis !

Outre la permanence du mouvement, principe de l’évolution. Descartes admettait également ce que les évolutionnistes appellent le continuel passage de l’homogène à l’hétérogène. La matière, pour lui, c’est l’espace homogène, et tout l’hétérogène a son explication physique dans les figures que le mouvement engendre à travers l’espace. Quant à cette variété par excellence qui est dans nos pensées et états de conscience, elle forme un monde tout différent du monde de l’étendue, lequel est déjà constant et complet en soi.

C’est au grand principe de la permanence et de la continuité du mouvement, qui, depuis Descartes, domine la science moderne, que se rattache la conception de l’inertie. « Chaque chose demeure en l’état qu’elle est autant qu’il lui est possible, et jamais elle ne le change que par la rencontre d’autre chose. » Lorsqu’une chose a commencé une fois de se mouvoir, « nous n’avons aucune raison de penser qu’elle doive jamais cesser de se mouvoir avec la même vitesse, tant qu’elle ne rencontre rien qui retarde ou qui arrête son mouvement ». L’inertie n’est donc encore, sous un autre nom, que la persistance de la même quantité de mouvement. La seule erreur de Descartes consiste à avoir admis