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L’HOMME.

abord, que tout ait été dit sur la philosophie cartésienne et sur ses destinées, nous croyons qu’il est toujours utile de ramener l’attention des philosophes et des savants vers ceux qui ont montré le but à atteindre et donné l’exemple des grands élans. Le progrès même des connaissances, à notre époque, nous expose à nous perdre dans les détails de l’analyse et dans des études spéciales qui rétrécissent nos perspectives. La fréquentation des génies nous ramènerait sur les sommets, devant les espaces infinis, d’où l’on entrevoit les premières lueurs des vérités avant même qu’elles soient levées sur l’horizon.

I. — « Le Breton Abailard, le Breton Descartes », disait Victor Cousin. Le fait est que René Descartes n’avait rien de breton : toute sa famille, de robe et d’épée, était du Poitou et de la Touraine. Son père, conseiller au parlement de Bretagne, ne venait à Rennes que pendant le semestre où ses fonctions l’y appelaient. René Descartes naquit, comme on sait, dans une petite ville de la Touraine, entre Tours et Poitiers, à la Haye, l’an 1596, le dernier jour de mars. L’affection maternelle lui manqua. Sa mère était morte, d’une maladie de poitrine, quelques jours après l’avoir mis au monde. Il avait hérité d’elle, dit-il, une toux sèche et une couleur pâle, « que j’ai gardée, jusqu’à l’âge de vingt ans, et qui faisait que tous les médecins qui m’ont vu avant ce temps me condamnaient à mourir jeune ». Son père, avec l’aide d’une nourrice pour laquelle Descartes se montra toujours reconnaissant et généreux, em-