Page:Fougeret de Monbron - Le Canapé couleur de feu.djvu/83

Cette page a été validée par deux contributeurs.

vaux, on déjeuna et on partit avant la pointe du jour. Jusqu’à Chambéry, tout alla au gré des désirs des uns et des autres. Jamais belle humeur ne fut semblable à celle de notre jésuite, qui n’était occupé que de la pensée des plaisirs qu’il se promettait dans la jouissance d’Angélique.

Mais, hélas ! de quoi ne sont pas capables l’intérêt et l’amour !

Dès le même soir qu’ils furent arrivés, le cavalier et notre belle eurent ensemble une conversation secrète où ils jugèrent la perte du jésuite.

Ce faux ami était d’avis que pour la punition de son crime il devait être livré aux pères de la Société, et il était fort en disposition de lui jouer ce mauvais parti si Angélique, plus compassive, n’eût contrarié ce dessein et n’eût jugé à propos de se contenter de le dépouiller de ce qu’il avait emporté avec lui.

Ce fut pour réussir à petit bruit dans ce dessein qu’étant couchée dans une même chambre où il y avait trois lits, elle s’approcha, aussitôt que la chandelle fut éteinte, de celui du père, le baisa, lui fit cent douceurs, la tête appuyée sur son chevet, lui fit mille protestations de fidélité