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fit du billet que voici, qui fut donné par un inconnu à son valet.

« Si vous êtes de qualité, vous démentez votre naissance par l’infâme commerce dont vous faites gloire. On a étudié toutes vos menées et on a découvert vos sales pratiques. La maison forte, où vous devez savoir que les filles de votre étoffe expient leur libertinage, vous attend. Fuyez si vous êtes sage. Dans trois jours il sera trop tard de partir. Consultez vos intérêts et prenez ce charitable avis de la part de la personne du monde qui vous hait le plus et qui irait sans doute vous insulter dans les fers que vous méritez. »

Cette belle, ainsi traversée dans ses plaisirs au moment où la fortune semblait la regarder d’un meilleur œil, fut bien mortifiée à la lecture de ce billet.

Cet avis, qui ne partait que d’une personne jalouse, et qu’elle présumait être la princesse épouse de son amant, lui parut extrêmement salutaire ; elle ne remit pas son départ au lendemain ; mais, ayant permis à son valet et à sa fille de chambre d’aller promener hors la ville, elle satisfit son hôte et fit porter son coffre au bateau d’Anvers, où elle prit place auprès d’un