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il se douta de quelque chose, ce qui fit qu’il le pressa de lui en faire le récit. Les larmes de cette belle travestie devancèrent son narré, et ce fut après les avoir essuyées qu’elle lui révéla tout ce qui s’était passé entre le conseiller et elle.

Elle lui dit qu’elle voyait bien que la jalousie s’opposait à son bonheur ; qu’il lui était dangereux de demeurer à la cour et qu’elle le priait de consentir à la plus cruelle séparation de sa part que se pût voir au monde.

Le prince écouta avec une patience fort inquiète cette histoire. Elle le saisit, en sorte qu’agité de deux mouvements différents, de colère et d’amour, il se jeta au cou du page, lui jura qu’il n’avait rien à craindre à la cour et qu’il saurait découvrir quels étaient ceux qui voulaient traverser ainsi ses plus doux plaisirs. Il crut bien que tout ceci était un effet des artifices de sa tante. Il rompit dans son cœur avec elle, et s’il continuait de lui rendre des visites, c’était purement par manière d’acquit.

Notre baronne travestie avait encore en ce temps-là plus de douze mille livres en joyaux et bijoux sur elle.

Le prince, qui n’en savait rien, lui fit présent